travail en cours autour du txt de christine jeanney : lotus seven
Des traits marqués à angles nets conviendraient mieux - penser aux héros de comics, visages durs, mâchoires larges et la barbe naissante striée d’encre de chine, sourcils froncés sous le poing en gros plan, bras dans la perspective du bras rétréci, BOUM, CLANG ! au combat, s’opposer au traître, résister à l’esprit démoniaque, un savant fou trame quelque chose.
des traits marqués à encre de regrets, vin blanc et cigarettes - à ligne aussi d'amour à bercer dans ses bras, la nuit, une petite pioute réveillée, et lui chanter "un bidon d'eau, deux bidons d'eau, trois bidons quatre bidons cinq bidons d'eau" et continuer le manège de l'eau en décomptant les bidons en ordre décroissant
Ce qui se trame et lui posé en bouclier. Nous des miettes, colifichets sans os, malléables mollusques, heureusement qu’il nous sauve. La virgule nous enlève le peu de résistance qu’on pourrait opposer (qui sommes nous pour nous opposer ?). Confiance en sa rapidité, en son expérience, il anticipe bien à l’avance les déplacements du cheval, le fou impuissant.
ce qui se trame et lui posé en bouclier. nous petites choses, pioutes de rien, mignardes, virgules débutantes, crevettes encore grises. heureusement qu’il nous sauve, guerrier intrépide. les yeux bleus lancent les fils de haute sécurité haute protection haubans d'amour autour de nous. tout le méchant, tout le mauvais du monde médusé hacké défié hypnotisé catapulté out out
Revenir à lui, lui qui vient d’apparaître et roule, chronologie admise (le contrat faux, s’imaginer que les heures se succèdent sans se doubler se dépasser, alors que bien sûr non, un souvenir imbriqué en écharde, l’intuition du demain, ordonnancement fouillis, projection modifiée, étape ratée, et qu’est-ce qui reste au fond, de chronologique, que le présent).
revenir à lui, au fond de l'horizon, dans la Chronologie du film, balancelle, quelle heure déjà, celle de l'ici maintenant du lirécrire, celle du txt de christine jeanney, celle de nos vies en lamelles de mémoire, celle de patrick. tempus fugit, soit. pourtant s'il n'était que temps présent, présent antérieur, présent du présent, et présent projeté
Fine ligne autour de la bouche, crispée mais peu, volontaire. Volonté conquérante, il croit au basculement à venir, il pense le provoquer, tendre vers lui, le happer (ses mains vigoureuses sur le volant), imprimer le futur avec cran, l’incurver, qu’il devienne aussi souple que la ligne sous sa bouche, ride audacieuse. Et la chronologie soumise en chienne affectueuse.
fine ligne autour du front, comme fruit de gloire à la mandorle. il croit en sa jeunesse, son énergie reconquise, ce vers quoi la vie le roule. le raide pliera sous les assauts de sa tendresse. son humour se jouera des virages trop serrés. aucune crainte mains sur le volant, comme maître du monde. dans sa poche les amandes veillent
Il se trompe. L’éclair cingle, monte, majuscule de commencement, début de phrase, premier mot et trop tard pour s’en inquiéter. Tout s’est construit bien avant les nuages et la route, en amont de la ligne sérieuse – pas incurvée celle-ci, mais droite – qui coupe la surface en deux bandes ciel/asphalte superposés. Faire chemin à rebours, on voudrait.
il se trompe. gris-gris ne suffiront pas pour écarter râpements, frottures abrasures et couteaux. vie en bonheur majuscule ne s'installera pas début de phrase. les antécédents fomentaient leur relative bien avant qu'il choisisse cette route-là, svelte et claire. crissements avaient déjà planté leurs crocs dans le texte du paysage. pense-t-il déjà à faire marche arrière
Ce serait simple (sans cesse des ruptures, des coupures, ça frotte constamment, pays de silex et d’étincelles. Et rien qu’une Lotus Seven, seule capable de traverser ce pays sans dommages). Appuyer sur une touche, route en machine arrière, et le trajet se rembobine. Revenir au point de silence, guetter la non-apparition dans l’air de l’éclat électrique.
ce serait simple (viennent plaintes sales et vertes invectives, ça use sec, pays de pierres lancées et de fleurs refusées. et rien qu'une Lotus Seven pour y échapper). dire seulement un mot et il serait ailleurs, dans autre temps, sur autre route. retourner à l'arc-en-ciel, aux bois de noisettes, sentinelle des mousses, sentinelle des bêtes et des champignons
Accumuler les si, paquets verts, vert de gris, sacs de tranchée empilés, abris anti-orage, et Si pas de nuages, et Si voir un village là où l’horizon vide, et Si un autre homme marche, mains dans les poches, observateur paisible, et Si les pointillés en direction contraire se dessinent, leur consistance moelleuse, oblongue, déformée par du Si, et Si.
accumuler les si. fouiller dans grammaire des optatifs. trancher dans matière du temps, un peu avant l'ici et maintenant, à la lame crantée. si pas de train. si pas y monter en même temps que l'autre. si un autre homme pour vivre cette foudre-là. si se lasser d'attendre à zagan. ah si l'on pouvait deux fois naître
Mais pas de si. Ou songer réellement à fuir. Fuir par la mer, quitter l’île, seul ou accompagné. En radeau ou bateau s’échapper, joindre la côte, reprendre pied, retrouver le continent, le monde normal, la ville. Ça peut sembler énigmatique, pourtant aucun mystère. Un homme qui roule dans une Lotus Seven. Du soleil dans la cuisine, volets baissés.
mais pas de si. alors fuir. fuir mais par où. longer le parc abandonné. suivre la première route. n'importe laquelle est la bonne pourvu que ce soit ailleurs. à pieds et sac au dos, en vagabond du bonheur, à contempler le monde et l'absorber. ou en Lotus Seven, conquérant d'un paysage d'asphalte. du soleil derrière, en flaques
Ce pourrait être un autre, autre homme autre véhicule, Aston Martin, et ils se croiseraient plus loin, d’ailleurs ils le peuvent, anticipés les croisements intersections, filatures pare-chocs contre pare-chocs, et accrochages à éviter, mais non, rencontre ultérieure évitée. Les chemins écartés inconsciemment, qui ne serviront pas, ou bien mal, ou si peu, qu’on abandonne, la poussière des routes limitrophes
ce pourrait être autre. remuer la gelée spatio-temporelle. bousculer relations logiques, niveaux de conscience. lancer du tohu-bohu dans l'ordonnancement du réel. inventorier les possibles sans avenir. redistribuer les dés. il y aurait un autre homme avec buick, rencontre à venir 10 mn chrono. et non. se fera pas. laissée sur le bord. seules les mésanges seront de la partie
Bridge Street, Parliament Street, Saint Margaret Street, blocs empilés, pavés assis sous les fenêtres et barreaux alignés en rambarde de pierre. Mais qui voudrait s’y appuyer, qui pour sauter (peut-être en d’autres temps hommes sombres à chapeaux droits vêtus de noir planent et s’écrasent au sol, une myriade de papiers vole, des billets plaqués sur les trottoirs.
bridge street, fenêtres rambardes. arsenal des bâtiments publics et leurs détails d'architecture. (soudain ça glisse spatio-temporel. va jusqu'à campagne de virginia woolf. passe belle cohorte d'enjambeurs : nicolas de staël, paul celan, gilles deleuze, gherasim luca, tous les anonymes se lançant dans l'effroi, tous les massacrés poussés. il y a du rouge mort sur macadam. morte ophélie flotte
Billets chiffonnés, dessus glissades des passants vite rattrapées – eux de dos s’esquivent rapidement mains dans les poches, épaules courbes en prévision d’un gros grain mais le ciel clair – un jeune garçon à casquette cheveux blonds filasses crieur brandit l’édition spéciale, pleine page, cours de la bourse, flèche du graphique pentue sous photo d’hommes en noir bras levés.
billets chiffonnés en tentatives à pas comprendre. ça continue tohu-bohu et glissement - nous cerveau douleur - et ce corps, boursouffletures au soleil de l'été urbain, parfums sans frisson de narines sauf pestilence, pas sauté, pas immergé, carabiné. édition spéciale : fait divers pleine connaissance amitié schlong. un petiot et une femme de reste. comment des relevailles sous les photos d'autrefois
Les mêmes qu’aux fenêtres, leur désespoir et bouches tordues en x exemplaires) quand ces fenêtres ne s’ouvrent pas, ne sont pas faites pour ça, se désintéressent de la lumière qui passe les vitres (n’ont pas besoin, ceux qui s’assoient, représentent, se désintéressent, se croisent aux portes, se serrent la main sans se regarder dans les yeux.
les mêmes mais lui vivant, leur vie à tous les trois installée, il n'y a pas si longtemps, sur le balcon, fenêtre sur la place. déjà over) balancelle avec retour à l'homme blond quand pioutes le regardent par la fenêtre de l'avenue, et que vespa disparaît là-bas. oh il a tourné. en route vers magasin, bureau, travail
Porte-buvard en rocking-chair au bas des contrats, tampons brièvement, pochettes dossiers, puisque néons et lampes en nombre, belles lampes, belles lampes à socles d’or et coque d’ambre enrobé sur l’ampoule) et les lampadaires dehors plombent, globes inversés. Froid. Bus rouges, camionnettes, scooters, agglutinement de gens au feu, ceux qui traversent, ceux qui travaillent, ceux qui visitent, vite.
porte-buvard en bois sur bureau en fer. tampons encreurs, numéroteuse pour factures, dossiers suspendus, porte-mines à marque scotch rouge, gomme, stylo, cendrier, gauloises, briquet, téléphone à plusieurs lignes avec voyants lumineux, lampe de bureau abat-jour bakélite bleue lignée, machine à comptabilité, meuble à papier, en chêne, néons, fenêtre sur cour et jardinet avec ateliers d'artistes : karel appel et kikoïne
Tailleur bleu marine, cravate, prendre une photo ou héler un taxi, grilles noires, tours carrées ciselées et grises qu’on dirait tailladées et ajourées minutieusement (des mains sur un morceau de bois qu’on creuse au canif, on examine sans rien comprendre, une flûte, une statuette, un ours une panthère, on ne sait pas on s’hypnotise, on perd le sens.
tailleur gaben a sans doute taillé le costume gris - cravate noire, héler un taxi, grilles de gare, tour à l'horloge. ciselures et rinceaux. (des mains sur un morceau de bois, gouges, ciseaux, ça menuise tablette, ça menuise outils : varlope, et rabot, ça grave initiales. ou ça mouline café. ou ça contrôle pinceaux, brucelle loupe et ciseaux et clope
Fixer le voyage des mains, le changement d’angle, les doigts s’arrêtent, retournent la pièce, obliquent, polissent, retournent encore et creusent ailleurs, fascination de regarder l’idée en marche se dérouler –vidéos qui ramassent en l’accélérant ce qui prend plusieurs jours, fleurir, faner, construire une maison, démolir une église vétuste) en surplomb de trapèzes verts, herbe rase délimitée.
fixer le voyage des mains. index et majeur : gauloise bleue papier blanc, cendre allongée courbe. cendrier. index et majeur : ciseaux. fleur du pinceau sous la loupe. coupe. dépose dans le casier-trieur en bois. fascination de regarder et ne pas voir ce poil de martre kolinski qui dépassait. index et majeur, encore un p'tit coup de nicotine). verdure jardinet par la fenêtre
Absurdité que cette idée d’anglais organisé, minutieux, jardin à la Windsor, la fleur pourrie dans le massif aussitôt effacée, précision, l’heure du thé, que des histoires. Si les anglais étaient précis, leur île serait carrée, au moins rectangulaire. Il n’y a qu’à voir cette carte, la découpe de la côte tortueuse, torturée, hasardeuse, terre de Rorschach.
absurdité cette verdure là-bas, in a kingdom by the sea, parc anglais déserté. hortensias le long de l'escalier, mais no joyeuseté. i prefer not to. torsades colonnades rambardes. décor pâte carton. bassin, mais où jet d'eau, où poissons rouges. où aubépines odorantes. où haies d'églantine blanche. où bourraches bleues. on ne voit pas d'oiseaux. no nighthingale
Contradictoire comme lui, l’homme aux virgules/visage trait, il est anglais. Ses rêves ne le sont pas, ses rêves projetés sur un écran, ses rêves fouillés, autopsiés, démembrés, entrés comme banque de données, bandes magnétiques imprimées de ses rêves tournent (mais cela bien plus tard, il n’en sait rien encore, nous non plus, même si nous devinons).
contradictoire comme lui, l'homme aux virgules. l'anglais. sa vie lancée sur écran. abîme de ses rêves. images volées, exposées, mécaniqueés. ça swipe mises à nu. (plus tard sa vie fictionnée dans texte poétiquée entrelacée lotus christine seven jeanney capitaux. n'en saura rien. jamais. nous si, bâtisseuses d'écriture. moulineuses de songes. constructeuses de réel. ici et maintenant
Je rêve quelquefois qu’il est dans la banquette, il a ôté sa chevalière avec sa montre, posées toujours au même endroit. Ici les endroits s’éternisent, se creusent, pas d’imprévus ici et c’est douillet. Mais j’ai peur peur de la grande boule blanche. La peur au même endroit dans la gorge, c’est sa place, posée comme lui.
je rêve quelquefois qu'il est dans le fauteuil. chevalière au doigt, montre gousset dans sa poche. au même endroit. éternité de mimosa pour l'homme blond. rêve je te dis dit hélène cixous. j'ai peur peur. sais bien que boule blanche est venue viendra appliquer sa pellicule sur son visage. et l'anéantifier. mais rêve. est encore là
À suivre le générique, la fin, on déplie ses jambes et la pendule sécurise, pas d’horaires souples ici, ça emprisonne ou ça rassure, c’est selon. Les jours sont prévisibles. L’anicroche, on la surveille de loin avec méfiance, c’est comme le téléphone, on sursaute quand il sonne. Et si quelqu’un frappe à la porte on est inquiet.
à suivre le générique, on note le numéro des voitures, on compte les coups de l'horloge, on voit les ombres dans le long couloir, la fumée passant par la serrure. la catastrophe est annoncée. certa, mais hora incerta. alors si téléphone sonne. si quelqu'un frappe à la porte. ça frissonne sec. ça croit que c'est déjà l'heure
voir explications http://semenoir.typepad.fr/semenoir/2011/10/entrelacis-lotus-seven-1-épisode-1-avec-cjeanney.html
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.