après avoir vu l'exposition d'Annette Messager : Les Messagers, Centre Pompidou, Paris, le 24 août 2007
pièce appartenant à une installation Articulés-désarticulés. 2001-2002
photo site culturae
installation : pantins automatisés en tissu, moteurs électriques, enclos mécanisé avec piquets métalliques, cordes, bois, câbles, ordinateur et logiciel informatique, 3 piques de bois, 6 colonnes en tissu, lampes et projecteurs.
envoie tes messagers
annette
dans le monde entier
1.
ça commence
manège par-dessus tête
la ballade des pendus
à travers les vitres
le parvis de beaubourg
bord bâtiment
nouvelle place de grève
où corps perdus
sans arrêt échouent
morceaux défilent
vous les voyez ci-attachés
cinq six
et plus
tissus pantinnisés
désarticulés
démembrés
en leur défroques
colorées
tourne
tourne
tourne
La ballade des pendus
2002
2.
mes petits moineaux en triptyque les pensionnaires envitrinés
dormez dormez dormez bien mes oiseaux
en vos lainages tricotés
rose bleu blanc layette naturalisée
sagement alignés en un dortoir improvisé
dix-sept par cinq
quatre-vingt cinq en la chambrée
pensionnaires reposez
morts
méchants petits moineaux
comme punition
vous voilà neuf couchés sur le dos
rivets écrous boulons
bien attachés à votre pilori
de fer horizontal
morts
bientôt l'heure de la promenade
mes zoziaux
chaussez vos pattes métalliques six
grimpez dans vos chariots à roulettes trois
les clés sont prêtes
vous allez être remontés
morts
Les pensionnaires
1971-1972
installation de trois vitrines
le repos des pensionnaires
la punition des pensionnaires
la promenade des pensionnaires
oiseaux naturalisés
plumes laine moteurs
socles de métal
3.
ô vous oiseaux naturalisés et autres animaux
métamorphosés greffés
déconstruits reconstruits
suspendus au ciel de vos morts-vies
perchés sur vos stèles aériennes
reflétant le monde du dessous
c'est nous que vous capturez
en vos miroirs aux alouettes inversés
morceaux réfléchis de notre déambulation
têtes en l'air à la mode aristophane
eux, sur leur poste d'observation
nous voient-ils les regarder
nous, sur notre poste d'observation
on les regarde et on se voit les regarder
eux et nous, nous et eux
de l'autre côté du miroir
Eux et nous, nous et eux
2000
4.
salle blanche
flottent
des petites touffes noires
effilochées dans le silence
petits animaux
protozoaires animées
minuscules soubresauts
mouvements légers
agissements de filaments
même direction
courants d ' air
une vie de poils
duvets
bourre effilée
hors de leurs lieux immobiles
observée depuis des meurtrières
béances horizontales
béances verticales
anfractuosités humaines
caricatures
désormais glabres
un chant inquiétant
envoûtant
noires notes
pubis aisselles oursins
soufflé dans du médusant
Les taches noires, 2006, tissu, fils de nylon, dimensions variables, collection de l'artiste
5.
de l'autre côté du couloir
mêmes meurtrières
regardeur promeneur
tu seras voyeuse
portraits au mur
visages de femmes
beauté minée de plomb
encrée de chine
dent noircie
œil griffonné rayé
encadrés même taille
une trentaine
polyptique
petits livres au mur
entrouverts
dos noirs bordés de rouge
accrochés à leur ficelles
taxidermie alignée
de quelle espèce
illisible
au sol
albums étalés
caisses superposées
dessins empilés
encadrements entassés
classeurs emplis
séries
elles gardent leur secret
La chambre secrète de la collectionneuse
1990-1995
6.
nounours
peluches
animaux doudous
bécassine
couchés entassés
laissés au sol
dans un coin
aux deux murs d'angle quarante centimètres au-dessus du tas
petites vitrines ex-voto pour vêtements de poupée
toutes petites photos d'un doigt encadrées noir accrochées sur chaque vêtement
s'accroupir
voici l'enfance qui passe
s'agenouiller
Histoire des petites effigies
1990-1995
7.
grandes photos d'une main
côté paume
lignes noires dans la main
encadrées noir
fond noir
polyptique
à sept grands rectangles
un esseulé
sur le mur blanc de retour
dégoulinade
d''un même mot
sous chaque photo
répété manuscrit
en colonne
à même le mur
lignes de couleur
surprise
rencontre crainte
menace hésitation
piège promesse
confiance
Lignes de la main
1988-1990
8.
un cercle
surface ronde sur le mur
noir et blanc rayé de traits couleur ficelle
au-dessus du cercle
réseau brouillé de fils verticaux
approche approche
curieuse
petites photographies ex-voto
nez
triangle de poils du pubis
sein
yeux
fesses
arcade sourcilière
nuque
main côté paume
pied
oreille
pénis
bouche ouverte avec vue
chacune suspendue à une ficelle
noir et blanc les photos
noir la bordure de chaque sous-verre
un chant funèbre
un chant érotique
la sphère de nos corps
mes vœux
1988
installation murale de photographies noir et blanc,
épreuves gélation argentiques
montées sous-verre avec cadres noirs formant un cercle et accrochée à des ficelles,
320 cm de haut, 160 cm de diamètre
9.
photo grande oreille habitée
photo grande main
photo grand pied
photo grand œil
photo grande langue à petit lutin
noir et blanc rehaussé de dessins
couleur ou noir et blanc encore
c'est pour mieux t'écouter mon enfant
c'est pour mieux te toucher mon enfant
c'est pour mieux courir après toi mon enfant
c'est pour mieux te voir mon enfant
c'est pour mieux te manger mon enfant
et vois-tu comme je penche vers toi
" du liebes kind, komm, geh mit mir
gar schöne spiele spiel' ich mit dir"
mes trophées
1986,1988
fusain, acrylique et pastel sur photographies en noir et blanc
10.
grande salle
couleurs
silence feutré
visiteurs parlent à voix basse
animaux incertains
morceaux de corps démesurés
habitent
cotons
feutres
tissus
installés dans un enclos rectangulaire
tantôt accrochés à des filins au-dessus du sol
quelques mouvements calmes les bousculent
tiens presque un acrobate
rouge
tantôt couchés au sol
tiens
une masse sombre traînée par une lente machinerie
sur le flanc
irrésistiblement sur le chemin de son désastre
parcourt inexorablement les bords de son ring
et dans les marges
appuyés au mur de la salle
des totems de tissu
bien ficelés
façon gigot
dans leur gaieté
de couleur
molle colonnade
au sommet
un personnage incertain
veille
pantin
les bras en croix
dans un coin
une haute pique de bois
perce-t-elle cet animal à allure de loup
regard enjôleur et tragique
jambes pantelantes quasi humaines
et dans ses bras un pantin rose qu'il tient par les jambes
douceur et cruauté
quelle descente de croix
quelle fable
quel rêve
Articulés-désarticulés. 2001-2002
Installation : Pantins automatisés en tissu, moteurs électriques, enclos mécanisé avec piquets métalliques, cordes, bois, câbles, ordinateur et logiciel informatique, 3 piques de bois, 6 colonnes en tissu, lampes et projecteurs, 560 cm de hauteur x 1500 x 1400 cm
11.
lumière calme
diffuse
incite au calme
un grand M
effiloché de filet
plume de boa venue se coller au mur
un noir et blanc d'araignée
un noir et blanc de poils
le mot s'endeuille
s'épingle
naturalisé
le reste des lettres
écrit à même le mur
ystéric
mystique du mot
mystique du mur
mystique de mulier
Mysteric,
2008,
filet, fil de fer
Superbes textes et mise en page virtuose (surtout quand on connait la difficulté à disposer les textes dans l'interface de typepad).
Voilà ce que j'écrivais, après avoir vu cette exposition, dont nous avons beaucoup parlé ensemble !
Acheté ni livre, ni catalogue. Pas pris de photos (c’est interdit mais je sais faire dans ces cas-là mais je n’avais pas d’appareil), des notes plutôt, des petits crobars, cette œuvre doit déposer dans l’imaginaire, elle doit vivre loin de ses représentations figées, c’est une œuvre qui bouge comme elle bouge dans la réalité, fluctuant au fil de ses étranges mécanismes, pulsant à celui des ventilateurs et autre souffleries. Il ne faut pas l’arrêter par l’image, seuls peut-être les mots peuvent la cerner. Elle entre en résonance….c’est un message, et je réfute l’idée qu’il est facile de gloser sur le nom de l’artiste. Elle est messager, d’un monde enfoui, multiforme, elle excelle à faire lever des représentations par dizaines, sans doute différentes chez chacun mais en même temps collectives, qui baignent par leurs racines dans la même eau.
JE RÊVE DE
Je rêve de Hélène Cixous écrivant, travaillant avec /sur Annette Messager
(septembre 2007)
Rédigé par : Florence_Trocmé | lundi 28 juin 2010 à 16:56